Le maire l’a dit et redit en Conseil municipal : il ne cherche pas à faire rêver, mais à « recréer » du lien social en privilégiant, notamment, le logement. La presse municipale ne dit pas autre chose : finis les projets « pharaoniques » pour lesquels la ville d’Amiens est trop petite. Que Gilles Demailly se rassure, les Amiénois ont effectivement cessé de rêver…
Malgré tout, la stratégie éprouvée consistant à critiquer toutes les options choisies sous l’ère Robien conduit la Municipalité à contredire ce discours fédérateur. Le Courrier Picard l’avait noté, le maire s’est à nouveau déclaré ouvert à la perspective d’un tramway amiénois, que la Municipalité précédente avait a priori écarté. Le tramway, cette vieille chimère picarde, fait bien entendu partie des fantasmes des habitants de notre ville. Qui ne s’imagine pas parcourant la rue des Trois Cailloux à bord de l’une de ses rames ? En matière de transports, la préférence de Gilles Demailly « va vers un tram« . Discours facile à prononcer qui caresse les oreilles crédules des Amiénois qui n’anticipent pas la hausse future des impôts locaux.
Il est en effet un moment où le rêve se heurte à la réalité. C’est lorsque cette réalité est ignorée que l’on peut parler de « projet pharaonique« . Le tram, n’en déplaise aux habitants de notre ville, fait malheureusement partie de ces projets.
Selon Gilles Demailly, « le coût de construction [d'une ligne de tramway] a tendance à diminuer« . Il n’empêche qu’il faut aujourd’hui compter un minimum de 15 à 20 millions d’euros pour s’offrir un kilomètre de tramway. Une somme pour une ville dont l’étendue équivaut à celle de Lyon !
Sans rentrer dans les détails, comparons notre situation à celle de la belle ville d’Angers, dont le tram devrait être inauguré en 2011. La capitale de l’Anjou a fait le choix d’un tramway à alimentation par le sol, comme Bordeaux, ce qui fait grimper la note à 29 millions d’euros par kilomètre. Est-on en effet prêt, à Amiens, à voir les caténaires et câbles d’alimentation se répandre en ville ?
Angers comptant environ 150 000 habitants contre 136 000 pour Amiens, nous pouvons considérer que nos situations sont comparables. Alors, pourquoi eux et pas nous ? Pas nous, en raison d’une trop faible densité amiénoise : 2.700 habitants au km² contre 3.500 à Angers. Par ailleurs, l’agglomération amiénoise ne dépasse pas 200.000 personnes, contre 340.000 à Angers. En clair, nous ne sommes pas suffisamment nombreux à habiter une ville bien trop étendue, ce qui obligerait à construire des lignes de tramway d’une longueur et d’un coût excessifs relativement à nos moyens, sans garantie d’une clientèle suffisante pour rentabiliser l’investissement.
La cité angevine a dépensé 240 millions d’euros pour 12 kilomètres de ligne, soit la distance approximative qui sépare la zone industrielle Nord du Sud-est amiénois (à titre d’exemple), mais avec beaucoup, beaucoup plus d’habitants susceptibles de prendre place dans l’une des rames du tram.
Qu’est-ce que le tram amiénois ? Des centaines de millions d’euros dépensés, des années de travaux pénalisant le chiffre d’affaires des commerçants, ainsi que la circulation des voitures et des bus (le maire s’en remettra-t-il ?) pour un résultat qui est loin d’être garanti en terme d’aménagement et comporte un risque majeur d’enlisement budgétaire… Cela ne ressemblerait-il pas à un projet pharaonique ?
Le maire a toujours accusé la Municipalité précédente d’avoir commandé sur le sujet une étude dont les conclusions étaient connues d’avance. Ne doutons pas qu’il en sera autrement cette fois-ci…
Dossier spécial de Ouest France sur le tram d’Angers en cliquant ici.
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